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Pandora & Piñata

Publié le 21 octobre 2017

Les opérations « pandora » et « piñata » s’étalèrent sur 2014 et 2015. Ces opérations de police furent la réponse que donna l’État espagnol aux événements de 2011 (mouvement du 15 mai, les indignés). Le gouvernement de la région de catalogne dût s’enfuir par hélicoptère, la queue entre les jambes, face à la colère de la rue. Le ressentiment que l’État espagnol et l’État régional nourrirent par la suite à l’égard des anarchistes, dont les idées jouèrent un rôle important dans le mouvement social, les conduisit à collaborer étroitement pour tenter de mettre un terme à leur influence.

Les mass-medias diffusèrent une image caricaturale ; celle d’un ennemi intérieur fabriqué sur mesure pour des opérations de police spectacle. Les médias allèrent jusqu’à mettre sur un même pied des idéologies diamétralement opposées selon un stéréotype s’adaptant au mieux au modèle terroriste du moment. Ils firent, tour à tour, la comparaison entre les anarchistes qualifiés de radicaux et Al-Quaïda ou entre les anarchistes et l’ETA. Les journaux n’hésitaient pas à afficher l’arrestation d’une cellule djihadiste, l’arrestation d’un homme chez lequel on avait trouvé un arsenal ou des groupes d’extrême-droite, côte à côte avec l’arrestation d’anarchistes accusés d’appartenir à une bande terroriste. Le message était clair.

Rien que les noms de ces opérations semblent avoir été, spécialement, choisis pour faire les gros titres des journaux. Il s’agissait de donner, des anarchistes, l’image d’individus extrêmement violents, fanatiques, motivés par le seul goût de l’insurrection et regroupés dans une mystérieuse organisation nommée les groupes anarchistes coordonnés (GAC). Cette présentation, faite par les medias, visait à créer un rejet par l’opinion publique mais visait tout en justifiant des opérations de police totalement arbitraires contre ce qui était censé être un complot envers des institutions présentées, elles, comme honorables. Ces « individus » étaient soupçonnés de fomenter la révolte en s’infiltrant sournoisement dans les mouvements sociaux pour les tourner vers l’action violente.

Pour pouvoir s’en prendre aux anarchistes, des lois anti-terroristes furent mises en œuvre par la « audiencia nacional », le tribunal spécial espagnol qui s’occupe de la lutte anti-terroriste, qui supervisa les opérations. La coordination, entre la « audiencia nacional », les flics de catalogne (mossos de esquadra) et la couverture médiatique, fut excellente et immédiate. Tous servirent la même version des faits avec la mise en scène d’un état d’alerte maximum.

La finalité de ces opérations de police s’appuyant sur des lois anti-terroristes, et menées avec un grand tapage médiatique, n’était pas tant de s’en prendre simplement aux anarchistes que d’arrêter la dynamique de radicalisation des mouvements sociaux. Les politiciens ne s’y trompèrent pas. Ce qu’ils redoutent, ce n’est pas tant les anarchistes que les mouvements de masse déterminés à aller jusqu’au bout de leurs idées, surtout si ces idées enclenchent un processus révolutionnaire qui leur échappe et les remet en cause. La seule façon de lutter contre les mouvements sociaux est, pour l’État, de criminaliser les luttes sociales en suggérant la promiscuité entre luttes d’action directe et terrorisme. S’il s’agissait d’attaquer l’indéfectible solidarité des anarchistes envers les mouvements sociaux, pour le rôle que leurs idées sont capables d’y jouer, et de leur faire endosser la responsabilité de « violences » ; il s’agissait, également, de permettre aux professionnels de la politique et du syndicalisme de récupérer le créneau des luttes sociales.

Suite aux opérations « Pandora & piñata » des manifestations spontanées de solidarité envers les victimes de la répression policière eurent lieu un peu partout en Espagne, notamment, au centre-ville de Barcelone où l’ampleur de la mobilisation atteignit un niveau qui n’avait pas été au RDV depuis les années 70’ ; ce qui ne manqua pas de marquer les esprits.

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