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LES ÉLECTIONS PASSENT, LES PROBLÈMES RESTENT ... ET EMPIRENT

Publié le 14 juillet 2014

En Corée du Nord, les élections sont un peu particulières. Dans ta circonscription tu votes pour... un seul candidat. Du coup – et clairement – les élections sont une cérémonie périodique de renouvellement d’allégeance au pouvoir, mâtinée de contrôle social. Les coréens qui n’accourent pas aux urnes sont repérés et leur sort devient vite périlleux. Les votants, eux, se pressent dans les bureaux de vote et, à l’annonce du résultat, dansent et acclament le gagnant dans une liesse générale obligatoire, fêtant l’heureuse surprise. N’en rions pas trop, pas trop vite. Nos élections (et les dernières européennes en particulier) dégagent comme un étrange parfum coréen...

L’intérêt des élections coréennes, c’est que leur coté brut offre un miroir à notre système dit de démocratie représentative. Il met à jour certains aspects cruciaux du rôle des élections dans notre société. Notamment leur fonction de légitimation du système, tout à l’inverse des visées affichées par les élus et candidats (qui se présentent – qui en douterait ? – pour servir la société et les administrés). Car chez nous aussi le rôle des élections est de valider un système politique, de le cautionner, de le rendre acceptable.

Second point commun : le coté « contrôle social ». En effet, si dans l’exemple de la Corée du Nord, l’unicité du candidat met en pleine lumière les dessous du spectacle, nous n’en sommes jamais très loin ici. Il ne faut pas se leurrer, les élections servent essentiellement à encadrer idéologiquement la population, à lui faire admettre qu’elle doit obéissance à ses chefs, à la soumettre, même si c’est avec plus de tact et de discrétion. Et les intérêts populaires dans tout ça ? Et l’amélioration des conditions – matérielles et intellectuelles - de vie des plus pauvres ? Et l’enrichissement des relations sociales de chacun ? Tout cela est bien oublié. La démocratie représentative, n’a pour véritable but que de défendre des intérêts bien précis  : ceux des possédants et des dirigeants. Il faut être bien naïf pour penser que ces messieurs-dames sont en mission pour nous...

Les dernières élections (européennes cette fois ci) sont, du fait du faible intérêt de la population (abstention record à chaque fois), facilement comparable avec celles de la Corée du Nord en ce qui concerne la légitimité (ou plutôt l’absence de légitimité) qu’elles confèrent aux heureux élus  ! C’est le troisième point commun. Ici comme là-bas, elles servent à concentrer un peu plus le pouvoir et à verser de grasses rémunérations à des hordes de technocrates payés à légiférer sur nos vies. Ces élections, comme les autres, ne peuvent apporter rien de positif. Elles peuvent même apporter beaucoup de négatif. Dans le cas présent, elles ont essentiellement servi à renforcer le Front National et des partis d’extrême-droite d’autres pays. Faisons remarquer que ces partis affichent un rejet complet de l’Europe et disent vouloir rompre définitivement avec elle. Gageons que leur révolte anti-européenne, leur rupture avec le système, n’ira pas jusqu’au refus, la tête haute, des juteux salaires, des insondables indemnités et autres prébendes que Bruxelles leur distribuera (à eux comme aux autres) avec une générosité d’autant plus grande que c’est nous qui payons. On n’est pas loin ici non plus de la Corée du Nord. Pour le cynisme. Et pour le renforcement des conceptions autoritaires.

Loin d’être ce gage de renforcement de la démocratie qu’on nous met en permanence sous les yeux, les élections européennes nous rappellent que le système électoral peut permettre à des minorités autoritaires de parvenir au pouvoir jusqu’à même… supprimer toute démocratie. Cela s’est déjà vu dans l’histoire… Quand elle ne conduit pas à des résultats aussi catastrophiques, la participation aux élections renforce au minimum le capitalisme et l’État.

L’abstention est donc pleinement justifiée, mais elle n’est jamais suffisante. Il serait irresponsable de laisser faire, il s’agit au contraire, de porter la contestation, de lutter, partout et toujours.
Inévitablement, ces élections européennes, après avoir soulevé le cœur de bien des gens, soulèveront la question de la lutte antifasciste. Les manifestations, parfois spontanées, qui ont accueilli les résultats ne sont pas à mépriser, mais elles sont insuffisantes. C’est un travail d’information, de relations, de solidarité, une présence au quotidien, dans la population, au milieu des «  difficultés » qu’il faut mener. Non pas se claquemurer frileusement (et confortablement) « entre soi », mais au contraire, aller à la rencontre des gens pour discuter, débattre, démontrer, pour soutenir les initiatives autonomes, pour redonner confiance en soi et en un autre futur.

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