Accueil > Luttes > Logement > CLERMONT-FERRAND : PLACE JAUDE , NOUS NE LÂCHERONS RIEN

CLERMONT-FERRAND : PLACE JAUDE , NOUS NE LÂCHERONS RIEN

Publié le 30 septembre 2013

Nous venons, à Clermont-Ferrand, ville très ancrée à gauche, de vivre une lutte, pas encore terminée, qui est remplie de leçons pour l’avenir. 360 demandeurs-euses d’asile exclu-es par le 115, les institutions ne répondent pas... Alors l’action directe, à travers l’occupation de la Place Centrale (Jaude) est lancée... Ci-dessous deux communiqués de notre syndicat (CNT-AIT 63) écrits pendant la lutte.

- 2 septembre 2013 -

« Nous vivons un fascisme doux
qui rend les gens apathiques
 »
Brad Wilk

Lundi 2 septembre, le 115 ne peut plus loger les demandeurs d’asile pour cause de fin de subventions étatiques. Les 350 expulsé-es (hommes, femmes et enfants) décident alors d’occuper la place de Jaude jusqu’à relogement. Rapidement, la solidarité populaire se met en route. Des familles se réfugient dans une église, qui sera incendiée, certainement d’origine criminelle, dans la nuit. Pour nous aucun doute, les fascistes en sont responsables.

Campement, douches, cantine, eau... tout se met en place. Une manifestation rassemblant 500 personnes sans drapeaux, exige le logement des sans-papiers. Mais rapidement la division, vieille stratégie étatique et policière arrive : des gymnases sont proposés, avec l’appui de certains « soutiens » (associations, partis ou syndicats). Or les gymnases sont excentrés, et un coup de filet de la préfecture afin de rafler les migrant-es y est plus aisé. La majorité des sans-papiers refuse, et une certaine forme de chantage (livraison de la nourriture par les associations humanitaires au gymnase) se met en place.

Contrairement à beaucoup, nous ne sommes pas indigné-es ou étonné-es de ce que fait le gouvernement PS/Verts. Nous n’oublions pas que les charters, les camps pour étrangers ont été mis en place sous des gouvernements de gauche, nous n’oublions pas, pour les politiciens déjà en campagne, que le PCF a un passé d’expulsion de squats de sans-papiers. Nous n’oublierons ni ne pardonnerons le rôle de la gauche, ses pratiques, qui sont responsables de la montée du fascisme. Pour nous anarchosyndicalistes, impliqué-es dans la solidarité sur le campement, la lutte doit rester entre les mains des concerné-es. Nous rappelons que 7 500 logements sont vides à Clermont-Ferrand, que l’Hôpital de l’Hôtel Dieu a fermé afin d’être vendu au privé etc. Nous n’attendons rien de l’État, ni de la gauche, sous toutes ses formes.
Union Locale CNT-AIT 63, le 2 septembre 2013

14 septembre 2013 -

« Aux mains de l’État, la force s’appelle droit.
Aux mains de l’individu, elle se nomme crime.
 »
Max Stirner.

Mercredi 11 se tenait sur le campement de Jaude un concert de soutien aux occupant-es. En plein milieu, des bureaucrates de la CGT et du Front de Gauche viennent démonter un premier barnum. Un bénévole du campement l’annonce au micro, mais est repris et on nous explique que c’est un accord avec la préfecture : afin d’éviter une évacuation par la police, on montre notre bonne volonté... Nous sommes plusieurs à ne pas être dupes et des échanges musclés ont lieu. On nous explique qu’on a « gagné », que se battre pour des papiers n’a jamais été à l’ordre du jour... C’est le fameux « Il faut savoir terminer une grève ».

Pendant ce temps, le chantage au gymnase, dénoncé dans le communiqué précédent, continuait. La solidarité populaire, elle, ne diminuait pas. Le mercredi soir se tient une assemblée, ou le poisson est noyé par les représentants CGT et RESF. Le lendemain, les autres barnums sont démontés, il n’en reste que deux : la cantine et le barnum médecine. On nous somme de croire la préfecture : les 360 sont logé-es... Le soir, la police et des militants fascistes viennent provoquer. Ils seront repoussés avec tact et mesure.

Hier matin vendredi, en pleine cantine, les deux secrétaires en chef de la CGT et un militant RESF viennent démonter le barnum cantine, en nous traitant de « morpions » au passage. Comme un symbole, pendant que les chefs démontent, des gens continuent de nous amener des sacs de vivres, vêtements, couches... Un retraité, amenant deux sacs de jouets pour les enfants, nous dira « On est en 40. Nous sommes les résistants, la CGT c’est les collabos ». Entre temps, la Croix Rouge a remis la liste des 360... au préfet. En plein après-midi, alors que nous tentions de tenir le campement, avec quelques demandeurs d’asile, une quinzaine de membres de la BAC arrivent, imposant un contrôle d’identité « pour notre fichier ». Insultes racistes, comportement violent... un militant est menotté. Devant notre refus de quitter cette place publique, c’est l’arrivée massive de CRS... Une militante RESF se fait jeter au sol et violenter. Elle devrait porter plainte. Nous lui assurons notre solidarité. Un compagnon qui a tout filmé voit sa caméra détruite. Quelques coups de matraques sont donnés. Nous passons sur les insultes racistes et sexistes.
Durant 6h, les CRS détruiront le campement, bloquant la population. Spontanément, 200 personnes se sont rassemblées. Une militante du camp se fait poursuivre et arrêter par les CRS et la BAC dans un... magasin de chaussures. Devant la foule médusée, les provocations continuent. Est alors entonné par la foule « Police partout, justice nulle part » et un petit « Pétain, reviens, t’as oublié tes chiens ». Une militante RESF se fera attraper dans une petite rue adjacente, par pure provocation.

Pire pour nous, arrivent les démonteurs de la CGT, les politiciens, les syndicalistes (FO...) qu’on n’a jamais vu pendant 10 jours d’occupation... Les CRS nous laissent récupérer un peu du matériel, au compte-gouttes. Le préfet reçoit une « délégation », dont le secrétaire CGT et le démonteur RESF... Ils exigent la libération de la militante, déjà au commissariat. Le préfet promet de la relâcher dans les 2 heures, fin de la rencontre... Pour celles et ceux qui s’entêtent à croire en l’État, elle a été relâchée... ce midi, malgré un rassemblement hier soir devant la préfecture puis le commissariat. Le gymnase a quant à lui été évacué par les CRS, et à l’heure actuelle, des demandeurs-euses d’asiles n’ont pas de logement. La logique de collaboration de la part des chefs de la CGT et de RESF avec la préfecture a eu raison de la dignité. La Pravda locale, « La Montagne », a quant à elle joué son rôle d’organe de presse de l’État.

Cet après-midi, la mairie socialiste organisait la « Fête de l’Egalité ». Sans honte. Pas de honte non plus pour la LDH, la Cimade, le Secours Pop qui nous ont lâchés très vite et qui par contre avaient leur stand. Malheureusement pour tous ces braves gens, 150 personnes se sont rassemblées Place de Jaude, avec banderole, tract, mégaphone. Évidemment, les soutiens de jamais (politicards), les démonteurs de barnum etc. étaient là... RESF obtient du peut-être futur maire PS une prise de parole. Nous demandons à RESF que témoignent celles et ceux qui ont vécu l’évacuation par les CRS. Ce qui nous est refusé... Pas de vagues. Puis une trentaine de personnes partent en cortège libre jusqu’à la Place de la Victoire où se tient aussi la « Fête », banderoles, tracts (500 de diffusés) et mégaphone « Un toit c’est un droit, des papiers pour tous », « C’est pas les immigré-es, c’est pas les sans-papiers, c’est le capitalisme qu’il faut virer ».

A l’heure où nous écrivons ces lignes, des demandeurs-euses d’asile n’ont pas été logé-es, la militante sera convoquée au tribunal. Des demandeurs-euses d’asile sont parqué-es dans un camp de rétention improvisé en pleine ville... A la CGT tout va bien. A RESF, ça va être compliqué... Nous saluons toutes et celles et ceux avec qui nous nous sommes retrouvé-es lors de l’évacuation par la CGT et les CRS, celles et ceux qui luttent jusqu’au bout sans concession. On ne lâchera rien, jamais.
Union Locale CNT-AIT 63, le 14 septembre 2013

Conclusion

Dix jours après le second communiqué, rien n’est réglé. Les familles sont éparpillé-es, ne parlons pas des célibataires... Les expulsions, les poursuites juridiques menacent les sans-papiers. La préfecture continue ses provocations devant les lieux d’hébergement. La CGT a quant à elle dénoncé les « incantations de quelques anarchoïdes plus soucieux de l’esthétique de leur posture que du sort de ces familles, elles n’ont pas aidé non plus. ». Décidément, la honte des démonteurs de campement n’a pas de limites (remarque, le barnum CGT restant a été épargné par les CRS, ça ne nous a pas trompé). Devant les graves dysfonctionnements de RESF, un comité alternatif de soutien s’est crée, pour ne rien lâcher, pour une lutte autonome. Quant à la militante interpellée, elle sera poursuivie. Nous en profitons pour exiger l’abandon des poursuites. Pour des infos supplémentaires, ne pas hésiter à nous contacter.

PCF (c’est pareil que PS) : Nous n’avons plus d’images de l’expulsion, la caméra du compagnon étant détruite par les CRS...

Contact


Envoyer un message