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Vers la fin du mythe islamiste ?

Publié le 13 mars 2011

La menace islamiste a permis à tous les gouvernements
des pays arabes de légitimer leur mainmise sur la
société et leur autoritarisme violent. L’exemple algérien
est des plus éloquents. La fin des années 80 a vu la junte
militaire et la Sécurité Militaire écraser la monté de la
contestation populaire. Pour faire oublier ces massacres,
les généraux décident de simuler une ouverture démocratique
en organisant des élections. Élections qui voient la
victoire du parti islamiste FIS. La junte refuse le résultat
et confisque le pouvoir. Pour se redonner de la crédibilité,
elle propulse Boudiaf, héros national, au poste de
Président. Il est assassiné. S’en suit une décennie de chasse
aux sorcières avec une succession effroyable de massacres
et exactions de la part des forces répressives algériennes
et des soi-disant extrémistes du GIA. Avec le temps,
la vérité semble émerger et dévoiler le double jeu du pouvoir
algérien. L’affaire des moines de Tibirine en 1996 a
révélé récemment que le GIA n’était pas responsable du
massacre, mais que c’étaient en fait les services secrets
algériens qui avaient mis en scène la mort des moines
pour justifier leur croisade anti-islamiste.

En Égypte les Frères musulmans sont agités comme
l’épouvantail islamiste local. Durant tout le mouvement,
les commentateurs occidentaux, qui avaient bien des privilèges
à perdre avec la chute de Moubarak, ont sans
cesse répété que la fin du régime faisait courir un grand
danger car c’étaient les islamistes, tapis dans l’ombre, qui
manipulaient le mouvement. Pourtant la position des
Frères musulmans dans l’Égypte de Moubarak était plus
qu’ambiguë : l’organisation, largement tolérée sous réserve
qu’elle ne s’attaque pas au portefeuille du Président,
avait toute liberté pour propager dans les masses son intégrisme
et, bien qu’interdite en principe de toute activité
politique, elle disposait de plusieurs sièges au parlement...
Les autres pays sont dans la même logique.

Certains sont ouvertement des théocraties. Dans ceux qui
se revendiquent du socialisme ( !!!) le fils du dictateur
peut avoir un prénom qui le désigne comme bras armé de
l’Islam. C’est que partout, les pouvoirs locaux, qui s’affichent
musulmans avec beaucoup d’ostentation utilisent la
religion pour jouer sur tous les tableaux : dans sa forme
oppressive traditionnelle, elle sert à conditionner la population
et à la soumettre idéologiquement ; dans sa forme
extrême, elle justifie la dictature et le soutien des puissances
occidentales.

Nous ne savons que trop que l’intégrisme religieux,
quelle que soit la religion, est incompatible avec la liberté
et nous ne pouvons qu’espérer que les mouvements en
cours sauront le faire reculer. Mais, manifestement, en
brandissant en permanence l’épouvantail de l’intégrisme
dès qu’une protestation sociale se fait jour dans un pays
arabe, notre propre pouvoir local n’est pas mû par le goût
de la liberté mais par la peur de la contagion.

J.

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