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Sans-papiers en lutte...

Publié le 25 mai 2008

Un électrochoc pour une opinion publique ensuquée depuis des années par la propagande médiatique ; voici ce qu’est la grève des sans-papiers. Dès le premier jour, par l’action, les grévistes de Paris ont démontré que si tous les sans-papiers de France décidaient de croiser les bras, des secteurs entiers de l’économie seraient à genoux : hôtellerie, bien sûr, mais aussi bâtiment, nettoyage, agriculture... Une évidence que les patrons (qui le savaient parfaitement mais que ça arrangeait bien de ne rien dire) ont été obligés de reconnaître publiquement. Aussi, cette grève, c’est une bonne claque dans la gueule de tous les Hortefeux, Sarkozy, et autres. Il suffisait de voir leur bobine à la télé... Cette grève, c’est un démenti cinglant opposé à tous ceux qui distillent leur ritournelle empoisonnée sur le thème "ils" ("les étrangers") ne viennent "ici" que pour "profiter de nous". Qui profite de qui ? la démonstration est faite.

Une autre démonstration de faite, c’est la complicité de la CGT qui encadre la lutte, mais aussi des partis, syndicats et mouvements divers qui soutiennent la CGT, avec le gouvernement : à aucun mo-ment, à ce jour du moins, ils n’ont exigé l’abrogation pure et simple du CESEDA (Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile). Or, c’est ce code qui fait des sans-papiers des hors-la-loi soumis aux persécutions policières. Au lieu de ça, la CGT s’est ruée sur la proposition des ministres Bertrand et Hortefeux de traiter dans les préfectures les régularisations au cas par cas . Ce qui est une façon, pour le gouvernement de s’en sortir la tête haute. Ce qui est une façon, pour la CGT et ses complices, de garder le pouvoir sur les sans-papiers : s’ils en veulent (des papiers), il leur faudra obligatoirement passer par elle pour en obtenir. Cette organisation se met ainsi en position de verrouiller de futures luttes. Une abrogation de la loi, une régularisation générale lui enlèverait ce pouvoir !

Exemplaire pour tous les salariés, cette lutte doit être soutenue et élargie en exigeant l’abolition du CESEDA.
Anatole

(Sur les relations CGT-Sarko, voir Le Canard Enchaîné (16/04/08) : “Sarko joue au Monopoly syndical : Tapis rouge pour la CGT...”).

SOLIDARITÉ AVEC LES SANS PAPIERS EN GRÈVE POUR LA LIBERTÉ
Depuis le 15 avril, plusieurs centaines de sans papiers sont en grève illimitée et chaque jours de nouveaux sans droit viennent grossir les rangs.

"Nous nous battons pour notre dignité, pour être respecté".
S’ils sont en grève, ce n’est pas tant pour obtenir des papiers et pouvoir travailler que pour pouvoir être libre. Méprisés, exploités, ils demandent juste le droit de pouvoir vivre normalement. "On paye des impôts, on cotise, mais on a droit à rien. L’état accepte notre argent mais refuse de nous donner des papiers". D’un côté, vache à lait d’un état rapace, de l’autre gibier de la police et fond de commerce des vendeurs de haine. Pour tout remerciement, l’état fourni gracieusement des centres de rétentions où les draps, payés avec leur argent, ne sont changés que tous les deux mois, comme l’a révélé le Canard Enchaîné la semaine dernière. "Je travaille 50 heures par semaine, mais je ne suis payé que 35h. Juste une prime de 300 euros en fin d’année". Moteur du système marchand dans bien des domaines comme la restauration, le bâtiment, le nettoyage, c’est la main d’oeuvre idéale pour des patrons qui se croient encore au temps des colonies. Pressions, paternalisme, cadences infernales, heures supplémentaires non payées, conditions de travail dégradantes, tels est leur lot quotidien depuis des années. "Ma vie se résume au travail et à la maison. Quand on ne travaille pas on ne sort pas car on a peur d’être arrêté". La clandestinité empêche même de pouvoir souffler un peu une fois sortie de l’enfer du travail. Après leurs 12 heures de travail, ils filent se terrer chez eux, en faisant des détours pour éviter certains lieux où ils risquent de rencontrer les policiers.

Ils n’ont pas de vie : pas de sport, pas de cinéma, pas de ballades avec des amis. La peur de l’arrestation arbitraire les contraint à vivre cachés. "Dans tous les bidons ville de Bamako, tu peux voir des publicités pour Orange". Les pays d’où viennent les réfugiés sont tout autant exploités qu’eux-même. Bouygues et compagnie détiennent toutes les ressources, comme les mines d’or au Mali. Avec la flambée des prix de l’alimentaire, l’argent qui est envoyé aux familles restées là-bas est vital, et s’ils subissent la pire des exploitations, ce n’est pas seulement pour eux, mais aussi pour ceux qui ne pourraient s’en sortir sans leur aide.

TRAVAILLEURS DE TOUS LES PAYS, UNISSONS-NOUS.
SOLIDARITÉ AVEC NOS FRERES ET SŒURS TOMBÉS EN ESCLAVAGE !

CNT-AIT, 108 rue Damrémont, 75018 PARIS
Email : contact@cnt-ait.info

(Ce tract a été rédigé suite à des échanges avec des sans-papiers sur différents sites occupés, auxquels la CNT-AIT de Paris apporte un soutien matériel et moral directs. Tout soutien, tout don pour les sans-papiers en lutte peut se faire à l’adresse ci-dessus.)

... et ça continue

L’article de la page qui précède était à peine rédigé et mis en forme que, comme pour confirmer son analyse sur le jeu auquel se livrent d’une part la CGT et ses alliés et d’autre part le gouvernement sarkozyste, le vendredi 2 mai, près de mille sans-papiers commençaient l’occupation de la Bourse du travail de Paris, et plus précisément de la portion des locaux appartenant à la CGT.

C’est pour protester contre l’accord signé entre la CGT et l’association Droit Devant (dirigée par les trotskystes du Nouveau parti anticapitaliste) avec Sarkozy et Hortefeux sans même les en avoir informés, qu’ils ont décidé de prendre les choses en main. Comme l’a dit l’un d’entre eux : "La CGT a pris le mouvement en otage. Nous, on prend en otage la Bourse du travail." Car ils ne sont plus dupes : des sans-papiers qui travaillent "dans la soute" il y en a quelques centaines de milliers ! Oser prétendre qu’il faut négocier au cas par cas, c’est ce moquer d’eux tous ; leur imposer de passer par la CGT et Droit Devant, c’est les prendre en tenaille entre deux machoires de fer pour les contraindre à la soumission. Cette stratégie a été exprimée par le pouvoir : lorsque le mercredi 20 avril le CSP 75 (Collectif Sans-Papiers) s’était rendu en délégation pour déposer les dossiers d’un millier de travailleurs sans-papiers auprès de la Préfecture de Paris il s’est entendu répondre qu’il fallait "faire des présentations individuelles ou aller voir la CGT". On ne saurait être plus clair.

Pendant ce temps, Hortefeux concédait mille régularisations en échange de la fin du mouvement de grève laissant à la CGT et Droit Devant sinon le monopole de la lutte du moins le monopole officiel du choix des sans-papiers à régulariser : camarade sans-papiers, t’as qu’a t’encarter, sinon , t’auras plus que tes yeux pour pleurer !

Pour faire semblant de"renouer le dialogue" qu’elle avait délibérément rompu, la CGT a bien entendu dépêché ses émissaires à la Bourse. Comme c’était prévisible, puisqu’il ne s’agit pas d’un quiproquo mais d’un choix politique de la CGT et de Droit Devant, ils sont repartis en invectivant des sans-papiers qui étaient hors de leur contrôle, et sous leurs huées. L’occupation de ce lieu symbolique se poursuit donc.

Pour revenir au sens de la chose, ce à quoi nous assistons est un deal immonde. Du "donnant-donnant" : les dirigeants de la CGT s’engagent à contrôler la grève, à éviter un embrasement général. Ils reçoivent en paiement mille cartes de séjour, ce qui leur permet, aux yeux des naïfs, de montrer leur "efficacité" mais aussi de fidéliser une clientèle, d’autant qu’ils reçoivent aussi la promesse d’être un passage obligé pour de futures régularisations.

Devant la poussée sociale, devant la multiplication de luttes sporadiques à travers tout le pays ; le gouvernement a besoin d’alliés, de "contrôleurs du social". La remise en selle de la CGT, correspond à ce besoin. Le pouvoir sait combien elle et les autres syndicats institutionnels peuvent être "efficaces" : les retraites, le CPE, les régimes spéciaux, tout comme bien des accords de branche ou d’entreprise ont permis de mesure leur capacité de trahison. Comment d’ailleurs un syndicat, financé à hauteur de 80% par l’Etat, se risquerait-il à le combattre, en soutenant ceux qui sont privés de tout ?

Malgré cette évidence, beaucoup de gens sincères "espèrent" encore un peu en ces syndicats. Ils adoptent ainsi la même position que leurs grand-parents, il y a bien longtemps, qui eux aussi "espéraient" en l’église catholique pour résoudre la question sociale. Aller à la messe ne leur a servi à rien, qu’à pérenniser le système ; soutenir (même mollement et de façon critique) la CGT et les syndicats institutionnels, conduit au même résultat. Qu’on se le dise.

Les journées de Mai 2008 (du 19 au 24)

Le "Rassemblement des ouvriers sans-papiers, gens d’ici, et leurs amis" lance un appel pour l’organisation d’actions dans la semaine du 19 au 24 mai à tous les travailleurs français et étrangers, avec et sans-papiers, aux jeunes et aux habitants des quartiers. Les objectifs poursuivis s’ont d’obtenir que tous les habitants du pays soient respectés et aient les mêmes droits ; de faire cesser les persécutions policières contre les ouvriers, les étudiants, les familles sans-papiers, les habitants des quartiers populaires ; de faire abroger le "Ministère de l’immigration et de l’identité nationale" et la loi CESDA ; de faut fermer les camps de rétention.
Le programme des journées comprend des réunions publiques, des rassemblements, mais aussi l’appel, pour le jeudi 22 mai à un arrêt de travail d’une demi-heure sur les chantiers pour prendre le temps de la réflexion et envisager la suite.

Plus d’informations sur le site : ouvriers, gens d’ici

Correspondance mail : ouvriersgensdici(chez)free.fr ; ou au n° 0613069462

Lycéens, y’a du processus dans l’air !
Les mouvements lycéens et étudiants se succèdent à intervalles de plus en plus courts. Printemps 2006, hivers 2007, printemps 2008. A chaque fois le mouvement gagne en lucidité, en maturité et en culture de lutte.

Lundi 28 avril 2008, jour de rentrée des classes de la "zone A". Lycée Michelet de Montauban. Une assemblée Générale vote à la mi-journée le blocage du lycée. Mardi 29 avril, dés 6 h. du matin des banderoles sont accrochées sur les grillages qui entourent le lycée. Des chaînes sont cadenassées sur les portes d’entrée. A 8 h. plus de 1 000 lycéens se retrouvent devant les portes bloquées et y tiennent une AG : le blocage est confirmé à une majorité écrasante ! Les ouvriers de maintenance du lycée sont envoyés par la proviseur pour casser les chaînes qui bloquent les portes, mais au lieu d’obéir, ils se solidarisent avec les lycéens.

Pour des raisons pratiques, une AG est proposée dans un parc à quelques centaines de mètres du lycée. Sur place, on décide de tenter la mobilisation du lycée Bourdelle qui se trouve à quelques mètres de là. La tentative échoue car les personnels de ce lycée, proviseur bille en tête, y montent une garde particulièrement agressive. On décide alors d’entamer une manif sauvage. Les RG (Renseignements généraux, police politique) essaient de savoir quel en sera le parcours, mais ils sont hués et finalement exclus de l’assemblée lycéenne. La manif part en ville et effectue plusieurs blocages mobiles en divers points névralgiques du centre-ville. Il en résulte de gros embouteillages. Se faisant les lycéens discutent avec la population pour expliquer leur action.

A maintes reprises ils sont encouragés et des travailleurs stoppent même temporairement leur activité... Après ces quelques blocages matinaux, qui judicieusement ne durèrent pas plus d’une dizaine de minutes chacun, les lycéens organisent en début d’après-midi une nouvelle AG. La proviseur du lycée Michelet réussit finalement à en faire ouvrir les portes, mais les personnels de "la vie scolaire" mécontents de ce tour de force se mettent en grève et participent à l’AG : 100% de grévistes à la vie scolaire, les cours ne peuvent plus être tenus !

Lors de cette énième AG les débats s’élargissent et l’on peut y entendre des amorces de discussions sur des thèmes de société. Pas question de se focaliser sur le thème exclusif du blocage. Une collecte est organisée, et les lycéens partent chercher de quoi créer des banderoles. Les jours de lutte à venir s’organisent....

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