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De l’utilité du salafisme

Publié le 14 janvier 2019

Après l’attentat islamiste de Trébes en Mars 2018 les médias ont véhiculé un argument assez original pour justifier la tolérance du pouvoir envers le salafisme : « on n’interdit pas une idée » ont-ils dit .Cette formulation repose sur une personnalité indéfinie le « on », comme s’il n’existait pas dans cette société une entité capable de censurer , de réglementer, d’interdire, cette formulation en réalité fait comme si l’ Etat n’existait pas.. .. Il suffit de rappeler cette réalité pour comprendre combien sous des dehors sympathiques cette expression est une énorme hypocrisie .

Non , dans cette société ce n’est pas quelque chose de vague, une personnalité indéfinie, qui possède la capacité d’interdire mais bien une entité juridique auquel appartient tout un appareil répressif et médiatique et qui en l’espèce ne s’est jamais privé d’interdire des idées. Certes il lui est encore heureusement impossible d’interdire à tout en chacun de penser ce qu’il veut. Par contre tout au long de l’histoire et sous toutes les latitudes nous avons assisté à la démonstration que le pouvoir ne s’est jamais privé de persécuter ceux qui propagent des idées qui le dérangent .

Oui , le pouvoir a toujours interdit des idées, pour en rester à l’histoire de la République Française citons les lois scélérates contre l’anarchisme, celles condamnant la propagande antimilitariste et les nombreuses interdictions de partis politiques qui ont lieu tout au long du XX iéme siècle. Par contre lors de la montée du fascisme constatons qu’effectivement celui-ci a bénéficié d’une clémence semblable à la tolérance actuelle pour le salafisme .

Non, l’État n’interdit pas les idées… quand ils pensent qu’elles peuvent lui servir, et oui il autorise voire favorise celles ce qui lui conviennent. Toujours suite à l’attentat islamiste de Trébes en Mars 2018 nous avons entendu un journaliste qui nous vendait la mèche : « quand même le salafisme a maintenu la paix dans les quartiers » disait- il en évoquant le spectre des émeutes de l’hiver 2005 .

A l’époque de ces émeutes tout le monde sait que l’État n’avait pas hésité à en appeler aux « grands frères ». Nadia Remdane une fondatrice de la Brigade des Mères de Sevran fait remarquer à ce propos que si pour calmer les émeutiers les autorités sont allés chercher, entendez par là subventionner, les « grands frères », ils n’ont pas fait appel aux grandes sœurs ni aux mamans. L’État en a appelé aux hommes, mais pas aux femmes, à la suite de quoi en cautionnant cet appel masculiniste, qui reléguait les femmes dans l’inaction politique ce qui est bien dans la ligne du salafisme, nombre d’institutions d’habitude plus pointilleuses sur les expressions sexistes, ont fait la part belle aux religieux. En favorisant par ce biais le développement de centres religieux, en augmentant le nombre d’imams, les dirigeants de ce pays ont favorisé la salafisme car du point de vue théologique celui-ci est une expression légitime de l’islam ( sinon la plus légitime parce que plus parfaite aux yeux de ses partisans).

Non, ce n’est pas parce qu’ils n’aiment pas interdire des idées ; ce n’est qu’ils seraient tout d’un coup devenus libertaires, qu’ils auraient abandonné tous leurs pouvoirs coercitifs, que plusieurs gouvernements n’ont pas interdit le salafisme. Ils ne l’ont pas interdit car ils ont estimé que ce dernier pouvait leur être utile. De la même façon que Bachar El Assad avait sorti de prison les fanatiques islamistes au début de la Révolution syrienne pour écraser l’aile progressiste de cette révolution et la discréditer définitivement aux yeux de l’opinion internationale, le pouvoir , ici et maintenant, a considéré qu’ils pouvaient lui servir d’auxiliaires .

Non , il n’est donc nul besoin ici de théorie du complot, à raison d‘un attentat sanguinaire tous les six mois il était fortement probable que cela finisse par tomber au cours d’un mouvement social. Cette conjonction s’est déjà produite deux fois. L’assassinat des policiers de Magnanvile a eu lieu pendant les manifestations contre la loi Travail et l’attentat du marché de Noël de Strasbourg a eu lieu en plein mouvement des gilets jaunes. A chaque fois cela a permis à l’État d’actionner deux leviers d’une mâchoire répressive destinée à étouffer la contestation sociale. Le premier consiste à infliger des procédures pénales anti - terroristes à de simples manifestants, ce qui permet de bafouer le droit de manifester, le deuxième consiste à développer une argumentation sécuritaire destinée à culpabiliser ceux qui en s’opposant à la domination capitaliste et étatique s’opposeraient à l’unité nationale.

Nous avons vu ces deux leviers à l’œuvre avec l’attentat de Strasbourg perpétré par un islamiste connu de longue date. D’un côté la police a pu agir comme dans les pires régimes autoritaires, a pu arrêter de trains entiers pour les retarder, a pu embarquer de simples passants et les placer 48 heure en garde à vue, et de l’autre nous avons entendu un discours médiatique consistant à interdire moralement aux gilets jaunes de manifester et à faire l’apologie de cette même police qui les réprimait, les tabassait et les mutilait à coups de flash-ball .

Pour l’instant nos minables Machiavels peuvent se frotter les mains, par leur cynique renversement de responsabilités ce sont ceux qui contestent un Etat complice de l’islamisme qui sont traités par le pouvoir comme des terroristes. La seule question qui se pose est jusqu’à quand va durer cette sinistre plaisanterie ?

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