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LA FNSEA SERAIT-ELLE SOLUBLE DANS LA DISCUSSION ?

Publié le 15 avril 2008

Adrian, faucheur volontaire du Tarn-et-Garonne (82), refuse lors de son interpellation de se soumettre au test de salive destiné à livrer son ADN, c’est-à-dire son code génétique. Pour avoir ainsi refusé de révéler une part de son intimité au FNAEG (Fichier national automatisé des empreintes génétiques), il est menacé d’une amende de 15 000 euros et de trois ans d’enfermement. Son procès est prévu le 11 janvier 2008 au TGI de Montauban.

Ce jour-là, la trentaine de militants pro-OGM de la FNSEA, venus pour exiger une lourde punition contre l’insoumis, avait déployé de bonne heure ses drapeaux sur la place. Voyant cela, une autre trentaine de militants, réunis à l’appel d’un collectif unitaire de Montauban contre les prélèvements ADN s’est sentie obligée de déployer ceux de leurs organisations respectives, faisant ainsi définitivement basculer ce rassemblement déjà houleux en une confrontation verbale puis physique. Les quelques personnes venues pour dénoncer la logique récurrente de répression policière et judiciaire de l’Etat, se trouvent alors prises en tenaille entre les deux camps. Elles sont les premières à recevoir en plein visage des épis de maïs (transgéniques, beurk !) partis des rangs de la FNSEA, prélude a des échauffourées plutôt vives. Suite à quoi on apprend que le procès est reporté au 8 février.

A la suite de cet incident, militants de la CNT-AIT et lycéens anarchistes montalbanais du CLAM, nous décidions de nous rendre le 29 janvier à la "réunion unitaire" du collectif tout aussi unitaire [1] pour y dire en quelques mots qu’il était inacceptable que des politiciens locaux (qu’ils soient de la FNSEA ou d’autres bords) s’amusent à provoquer la population pour la diviser encore plus. Nous y avons annoncé également notre intention d’aller, le 8 février, tract à l’appui, expliquer aux paysans violents qu’ils sont manipulés par leurs dirigeants. Un tract destiné à défendre une position plus globale qu’un simple refus du fichage ADN ; et à mettre en parallèle la situation faite aux petits paysans (élimination programmée de la paysannerie, développement du "tout profit" pour les multinationales du secteur agro-industriel,...) et celle qui est faite à tous les opposants (fichage, répression de fer,...), avec une conclusion qui s’impose : si aujourd’hui, c’est Adrian qui est poursuivi pour avoir refusé un test ADN, demain ce sera le tour de viticulteurs, d’horticulteurs en colère et de quiconque refusera de se soumettre aux lois du marché. Face à la répression grandissante dans ce pays, dont les tests ADN ne sont jamais qu’une facette, la compréhension des mécanismes de l’oppression, la dénonciation des classes dirigeantes et la solidarité à la base sont plus que jamais à l’ordre du jour.

Dès qu’ils s’est agi de nous répondre, la mauvaise foi politicienne s’est étalée : tour à tour, on nous a opposé qu’une position plus large contre la répression était "trop idéologique" (trop risqué en période électorale, pour des huiles de la LCR et du PCF), qu’en déviant de leur ligne politique notre attitude était scandaleusement autoritaire (un reproche à hurler de rire dans la bouche de ces gens-là), enfin que, sous couvert de discussion avec des paysans encadrés par la FNSEA, nous ne rêvions que d’aller leur taper dessus et prendre ainsi en otage de braves pacifistes (très mauvais aussi en période électorale). Tout cela sur un ton évidemment agressif, et évidemment très, très autoritaire. Et pour bien montrer leur désintérêt envers toute forme de solidarité concrète, de conclure "On n’est pas là pour soutenir une personne en particulier". Effectivement, ce qui les intéresse, c’est pas de soutenir, c’est de s’engager pour la forme tout en étant prêts à se désengager à tout moment, de critiquer, mais vraiment pas trop, de s’en prendre au symptôme (fichage ADN) et nullement à la cause. C’est toujours la même scène que nous rejoue cette bande d’hypocrites. Le principal concerné, Adrian, ne s’y est pas trompé car ce fut l’un des rares à soutenir notre initiative lors de cette réunion. Tirant les conclusions du désaccord, nous décidions - les copains présents, Adrian ainsi qu’une ou deux autres personnes présentes - de laisser les réformards entre eux et de vaquer à nos occupations militantes.

Dès le lendemain, ce fut une avalanche de rumeurs les plus folles, sur le net comme par le bouche à oreilles. "On" disait partout que la FNSEA mobilisait massivement ses troupes pour le 8 février et que ce serait terrible. "On" entendait que les anarchistes préparaient des violences insoupçonnées pour ce jour là. "On" expliquait, à mots plus ou moins couverts, que ce sera très dangereux d’approcher du tribunal, quasiment de la folie pure. "On" aurait voulu démobiliser les bonnes volontés, "on" ne s’y serait pas pris autrement.

De notre côté, nous appelions tranquillement à une Assemblée populaire et à un soutien devant le tribunal.

Le 8 février, à 12 h 30, l’Assemblée populaire rassemblait, à l’heure et au lieu prévus, une trentaine de personne. Les échanges, nourris, portaient sur la répression, sur l’actualité sociale et aussi sur un autre futur. Un peu avant 14 heures, la petite troupe s’ébranlait, renforcée chemin faisant par une dizaine d’autres personnes. Quand la quarantaine de présents venue soutenir Adrian se retrouve devant le tribunal, surprise : pas plus de FNSEA que de beurre en branche. Pas le moindre gauchiste, pas le moindre drapeau non plus (ça, on s’y attendait). Pourquoi la FNSEA n’est-elle pas venue ? Mystère. Peut-être, tout simplement, que ses dirigeants ne souhaitaient pas trop que nous discutions avec leurs simples adhérents, des fois que des agriculteurs de base comprennent, on n’est jamais assez prudent... Tout se déroule donc dans le plus grand calme. Finalement, deux ou trois gauchistes font, de loin, une frileuse apparition. Comme on les a vu, ils viennent saluer, avec un sourire bien jaune. Dans la salle, le procureur demande une amende de 300 euros, l’avocat demande la relaxe pure et simple. Verdict le 7 mars. Mais pas besoin d’attendre cette date pour le Comité gauchiste. Tout le monde a pu le juger sur pièces.

Francis

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